Objectifs
- Distinguer les trois types de questions et identifier la prosodie typique de chacun
- Poser des questions avec l'inversion, est-ce que, et des structures déclaratives
Observez et déduisez
Qu'est-ce que vous remarquez par rapport aux parties soulignées du texte suivant ?
— Eh bien ! voilà justement ; de quel pays est le comte ? quelle langue parle-t-il ? quels sont ses moyens d’existence ? d’où lui vient son immense fortune ? quelle a été cette première partie de sa vie mystérieuse et inconnue qui a répandu sur la seconde cette teinte sombre et misanthropique ? Voilà, à votre place, ce que je voudrais savoir.
— Mon cher Franz, reprit Albert, quand, en recevant ma lettre, vous avez vu que nous avions besoin de l’influence du comte, vous avez été lui dire : Albert de Morcerf, mon ami, court un danger, aidez-moi à le tirer de ce danger, n’est-ce pas ?
— Oui.
— Alors, vous a-t-il demandé qu’est-ce que M. Albert de Morcerf ? d’où lui vient son nom ? d’où lui vient sa fortune ? quels sont ses moyens d’existence ? quel est son pays ? où est-il né ? Vous a-t-il demandé tout cela, dites ?
— Non, je l’avoue.
Le Comte de Monte-Cristo, Alexandre Dumas (domaine public)
Considérez ces questions :
- Quelles questions dans ce passage attendent comme réponse oui ou non ? Lesquelles attendent une autre réponse ?
- Comment est-ce que la forme des questions oui/non est différente des autres questions ?
- Quel est l'ordre du sujet et du verbe dans la plupart de ces questions ? Quel est l'ordre du sujet et du verbe dans la question qui se termine par n'est-ce pas ?
- Quand une phrase est au passé composé, quel est l'ordre du sujet, de l'auxiliaire, et du participe passé ? Quand une phrase a un complément pronominal (lui, vous...), quel est l'ordre du sujet, du verbe, et du complément ?
- Où observez-vous la forme -t- ? Pourquoi est-ce que cette forme apparaît dans les expressions parle-t-il et a-t-il mais pas est-ce ou est-il ?
Une phrase interrogative pose une question. Il existe trois types de questions :
Les questions totales attendent comme réponse oui ou non (ou si, peut-être, etc.). Elles sont totales car elles incluent toute l’information de la phrase (le sujet, le verbe, les compléments…), et la seule information qui manque est si la phrase est vraie ou fausse.
Vous êtes d’accord ?
Est-ce que tu aimes bien aller à l’école ?
Les questions alternatives donnent des alternatives et attendent une réponse qui en choisit une. Comme les questions totales, elles contiennent toute l’information que contient une phrase déclarative et n’ont pas de mot interrogatif. Mais contrairement aux questions totales, elles n’attendent pas une réponse oui ou non.
Tu as pris le haut ou le bas ?
D’abord êtes-vous chrétien, juif, ou athée ?
Les questions partielles ont une partie de la phrase (le sujet, le complément…) qui est remplacée par un mot interrogatif. Elles attendent une réponse qui fournit cette information qui manque.
Qui vous a donné ça ?
Quand ces efforts vont-ils porter leurs fruits ?
Vous l’avez rencontrée comment ?
🛈 Information : Chaque type de question a une prosodie (ton de voix) différente. Les questions totales ont généralement un ton qui monte vers la fin de la phrase, souvent sur la dernière syllabe :
- Est-ce que tu aimes bien aller à l’école↑ ?
Les questions alternatives ont généralement un ton qui monte sur la/les première(s) alternative(s) et qui tombe sur la dernière :
- D’abord êtes-vous chrétien↑, juif↑, ou athée↓ ?
Les questions partielles ont généralement un ton qui tombe vers la fin de la phrase :
- Qui vous a donné ça↓ ?
Notez que le point d’interrogation est typiquement précédé en français d’une espace insécable, comme le point d’exclamation, les deux-points, le point-virgule, et les guillemets.
Il y a trois moyens de poser une question totale en français. Ils sont grammaticalement équivalents, mais chacun est associé à un style et un contexte particuliers.
On peut formuler une question totale en ajoutant est-ce que au début d’une phrase déclarative (est-ce qu’ si le mot qui suit commence par une voyelle ou un h muet).
Est-ce que vous avez perdu votre accent lyonnais assez facilement ?
Est-ce que appartient à un registre familier et c’est plus commun à l’oral qu’à l’écrit.
On peut aussi formuler une question totale par inversion de l’ordre du pronom sujet et du verbe. Le verbe est lié au sujet par un trait d’union.
Veux-tu nous expliquer le dessin que tu as fait de ta famille ?
Poser une question par inversion est plus commun à l’écrit qu’à l’oral et appartient à un registre plutôt formel.
A la troisième personne du singulier, lorsque le verbe se termine par une voyelle, un -t- est ajouté pour faciliter la liaison.
L’aime-t-il vraiment ? Elle en doute.
Va-t-elle gagner la cagnotte ?
Sera-t-on prêt à relever le défi ?
Lorsque le sujet est un nom (propre ou commun), le pronom sujet correspondant (il, elle, ils ou elles) est ajouté pour faire l’inversion avec le verbe.
Netflix signe-t-il la fin de la télévision ?
La révolution technologique en cours va-t-elle changer les choses ?
Aux temps composés, comme le passé composé, le pronom sujet est inversé avec l’auxiliaire. Le participe passé suit le sujet.
La promesse a-t-elle été tenue ?
As-tu goûté tes produits ? -Non.
Pour la négation de l’inversion, ne précède le verbe conjugué et le négateur (pas, jamais, plus, etc.) suit le pronom.
N’a-t-il pas entendu ?
Cela ne finira-t-il jamais ?
Les formes inversées de c’est et il y a sont est-ce et y a-t-il.
Est-ce vraiment nécessaire ?
Y a-t-il un risque d’embrasement ?
🌍 Variation : Si l’inversion appartient à un registre plutôt formel, l’inversion à la première personne du singulier est encore plus soutenue. C’est défendu dans la plupart des cas et seulement permis avec quelques verbes : suis-je (être), ai-je (avoir), vais-je (aller), et dois-je (devoir). Pouvoir a une forme spéciale utilisée seulement en inversion pour remplacer peux : puis-je.
On peut poser une question totale avec une structure identique à celle d’une phrase déclarative. La seule différence est la prosodie (le ton de voix monte vers la fin de la phrase).
Tu veux que je laisse la lumière allumée ?
Ce type de question appartient à un registre familier, est utilisé plus à l’oral qu’à l’écrit, et s’utilise rarement en début de conversation. C’est typiquement utilisé pour continuer une conversation, et surtout pour réagir à ce que quelqu’un d’autre vient de dire.
Les questions à structure déclarative sont souvent utilisées quand on cherche une confirmation. Si on sait déjà ce que sera la réponse mais on veut exprimer la surprise ou recevoir une explication, on aura tendance à utiliser cette structure.
Tu crois que ça va résoudre nos problèmes ?
Il est déjà arrivé ?
On peut ajouter des expressions négatives (n’est-ce pas, non, pas vrai) à la fin de la question pour souligner qu’on cherche une confirmation.
Vous mangez avec nous, n’est-ce pas ?
C’est un peu ringard, non ?
🌍 Variation : En français européen, on dit si plutôt que oui pour faire une réponse affirmative (contraire) à une question négative :
- Vous n’êtes jamais venus ? Mais si (on est venus) !
En Amérique du Nord, on dit toujours oui pour une réponse affirmative, même si la question est négative :
- Vous n’êtes jamais venus ? Mais oui (on est venus) !
En français africain, on dit oui pour confirmer une question et non pour la contredire, qu’elle soit affirmative ou négative :
- Vous n’êtes jamais venus ? Non (on est venus)
- Vous n’êtes jamais venus ? Oui (on n’est jamais venus)
Ouais est une forme très familière de oui, utilisée entre amis dans la conversation informelle.
Les questions alternatives sont formées de la même manière que les questions totales, sauf qu’elles comportent la conjonction de coordination ou.
Chez vous, c’est plutôt classique ou contemporain ?
Une question alternative peut attendre une réponse oui/non si la deuxième alternative est un adverbe négatif :
Tu vas jouer ou non ?
Il faut laisser sécher ou pas ?
On peut aussi poser une question avec ou quoi. Alors que cette construction a la structure d’une question alternative, c’est généralement plutôt une accusation pour laquelle on demande une explication.
Vous boudez mon post, ou quoi ?
Les questions partielles remplacent un élément de la phrase par un mot interrogatif, qui peut être un pronom, un adjectif, un adverbe, ou un déterminant.
- qui, que (quoi), lequel, quel, combien, comment, où, pourquoi, quand
Quel, qui indique un choix, est un déterminant qui doit précéder un nom qu’il détermine et s’accorde avec ce nom en genre et en nombre (quelle, quels, quelles).
🛈 Information : Quel peut également être utilisé dans un sens exclamatif :
- Quelle bonne surprise !
- Quels beaux dessins !
Lequel est un pronom qui remplace quel + nom pour indiquer un choix. Il assume le nombre et le genre du nom qu’il remplace (laquelle, lesquels, lesquelles). Avec les prépositions à et de il fait les formes amalgamées auquel (auxquel(le)s) et duquel (desquel(le)s).
Combien peut être seul ou suivi d’un nom qu’il quantifie, marqué par la préposition de.
Que devient quoi quand il est le complément d’une préposition (avec quoi, en quoi, etc.).
🛈
Information : Le mot interrogatif
qui indique une personne et le mot interrogatif
que indique une chose. Ces pronoms interrogatifs peuvent être le sujet de la phrase ou un complément.
Ne confondez pas ces mots avec les pronoms relatifs
qui et
que. Le pronom relatif
qui a la fonction du sujet (qu’il soit une personne ou une chose) ou la fonction du complément d’une préposition (seulement si c’est une personne). Le pronom relatif
que a la fonction du complément direct (qu’il soit une personne ou une chose). Voir
Pronoms relatifs pour plus de détails.
Les questions partielles ont les mêmes structures possibles que les questions totales (est-ce que, inversion, structure déclarative).
Pour former une question partielle avec est-ce que, mettez le mot interrogatif devant est-ce que au début de la phrase.
Pourquoi est-ce que j’entends dans ta voix de la tristesse ?
Qu’est-ce que vous faites dehors à cette heure-ci ?
Mais qui est-ce que j’entends rire comme ça derrière ?
Quelles idées est-ce qu’il te met dans la tête ?
Et combien de temps est-ce que ça va durer ?
Si le mot interrogatif remplace le sujet de la phrase, on utilise est-ce qui au lieu de est-ce que.
Qui est-ce qui a apporté une bouteille ?
Qu’est-ce qui se passait dans sa petite tête ?
Qu’est-ce que c’est que est utilisé pour demander une définition ou pour exprimer l’incrédulité.
Qu’est-ce que c’est que ce truc ?
Mais qu’est-ce que c’est que cette tenue !
On peut aussi mettre un mot interrogatif au début d’une phrase dont le verbe et le pronom sujet sont à l’ordre inverse.
Laquelle voulez-vous ?
Pour qui peuvent-ils voter ?
Qu’avez-vous fait pendant dix ans ?
Comment allez-vous ce matin ?
Quel âge as-tu ?
Quelle heure est-il ?
L’inversion dans une question totale ne peut se faire qu’avec un pronom sujet. Si le sujet est un nom, on doit ajouter le pronom correspondant pour faire l’inversion. Par contre, dans une question partielle, si le verbe est conjugué à un temps simple, on peut faire l’inversion avec un nom sujet ou un pronom sujet. Si on fait l’inversion avec un nom sujet, il n’y a pas de trait d’union entre le verbe et le nom.
Où sont les filles ?
A qui appartient cette veste ?
On peut séparer quel du nom qu’il modifie par le verbe être :
Quel est votre avis réel sur les OGM ?
Si le mot interrogatif remplace le sujet, la manière la plus typique de formuler une question est simplement de mettre le mot interrogatif dans la place du sujet, devant le verbe (Notez que que ne peut pas être sujet dans une question à structure déclarative—il faut utiliser qu’est-ce qui).
Qui va gagner la Coupe du monde ?
Combien ont réussi à arriver jusqu’ici ?
Quelles couleurs sont à la mode ?
Laquelle serait moins grave ?
On peut aussi utiliser une structure déclarative si le mot interrogatif remplace le complément ou une autre partie de la phrase, en mettant simplement le mot interrogatif dans sa place après le verbe. Cette structure appartient à un registre familier et est plus commun à l’oral qu’à l’écrit. Notez que le mot interrogatif que devient quoi après le verbe.
Tu préfères quoi ?
Je mets laquelle ?
Tu t’appelles comment ?
Ils sont partis où, les pompiers ?
Les adverbes interrogatifs pourquoi, comment, et où peuvent aussi être mis en début de phrase, suivie d’une structure déclarative. À part Comment tu t’appelles ?, formulation courante qui utilise cette structure, ce type de question appartient à un registre très familier et n’est pas standard.
Pourquoi tu dis ça ?
Comment il va ?
Où tu vas ?
🌍 Variation : Pour demander à quelqu’un de répéter ce qu’il vient de dire, ou pour exprimer l’incrédulité, on peut dire « Comment ? ». Dans un registre très familier, on peut dire « Quoi ? » avec le même sens. Dans un registre plus formel, on peut dire « Pardon ? » pour demander à quelqu’un de se répéter, mais pas pour exprimer l’incrédulité.
C’est possible d’inclure plusieurs mots interrogatifs dans la même question. Si deux mots interrogatifs viennent avant ou après le verbe, ils doivent être liés par une conjonction de coordination (ou, et, etc.). On peut aussi avoir un mot interrogatif devant le verbe et un autre après.
Comment et pourquoi avez-vous pris cet enfant ?
Vos fans pourront vous retrouver où et quand ?
Première question : qui était au courant de quoi et quand ?
Vérifiez votre compréhension