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  • Les temps littéraires

    Nuage de verbes aux temps littéraires
    wordclouds.com

    Objectifs

    Observez et déduisez

    Qu'est-ce que vous remarquez par rapport aux parties soulignées du texte suivant ?


    Elle voulut qu’il se vêtît tout en noir et se laissât pousser une pointe au menton, pour ressembler aux portraits de Louis XIII. Elle désira connaître son logement, le trouva médiocre ; il en rougit, elle n’y prit garde, puis lui conseilla d’acheter des rideaux pareils aux siens, et comme il objectait la dépense :

    — Ah ! ah ! tu tiens à tes petits écus ! dit-elle en riant.

    Il fallait que Léon, chaque fois, lui racontât toute sa conduite, depuis le dernier rendez-vous. Elle demanda des vers, des vers pour elle, une pièce d’amour en son honneur ; jamais il ne put parvenir à trouver la rime du second vers, et il finit par copier un sonnet dans un keepsake.

    Madame Bovary, Gustave Flaubert (domaine public)


    Considérez ces questions :

    • Tous ces verbes sont conjugués à la troisième personne du singulier. Quelle est la terminaison pour des verbes -er (désirer, trouver, conseiller, etc.) ? Quelle est la terminaison pour des verbes -ir (rougir, finir, etc.) ? Quelle est la terminaison pour des verbes -oir (vouloir, pouvoir, etc.) ?
    • Comment la forme des verbes vêtît, laissât, et racontât est-elle différente des autres verbes ? Pourquoi ?
    • Dans un style familier ou oral, on remplacerait la plupart de ces verbes par quel temps/mode ? On remplacerait vêtît, laissât, et racontât par quel temps/mode ?

    Introduction

    Certains temps du passé qui étaient utilisés couramment dans le français d’autrefois sont devenus archaïques. Ils ont été remplacés dans le français oral, et de plus en plus dans le français écrit, par d’autres temps du passé (comme le passé composé, par exemple).

    Ces temps sont encore utilisés dans un style très soutenu, principalement à l’écrit. On voit ces temps parfois dans les journaux, les romans, les documents religieux, la correspondance officielle, et d’autres genres formels. Aux registres informels à l’écrit (par exemple dans les blogs, les mails, les affiches…) on n’utilise pas ces temps. À l’oral, ces temps ne sont presque jamais utilisés. L’exception serait des genres oraux très formels, comme un discours politique préparé à l’avance, ou des situations où on souhaite apporter un sens archaïque, comme quand on raconte un conte de fées. On appelle ces temps les temps littéraires car ils sont souvent utilisés dans un style érudit de littérature.

    Pour la plupart des gens qui apprennent le français comme langue seconde, il n’est probablement pas très utile d’apprendre à conjuguer les temps littéraires. Mais il est important de savoir les reconnaître, afin de comprendre des textes qui les utilisent.

    Le passé simple

    Le passé simple est utilisé à la place du passé composé. Dans des narrations dans un style littéraire, on utilise le passé simple pour des évènements et l’imparfait pour des descriptions (voir Imparfait). Ce temps s’appelle le passé simple car, en contraste avec le passé composé qui comprend un auxiliaire, il n’y a qu’un mot.

    Notez l’emploi du passé simple dans les phrases suivantes, dans des contextes où on utiliserait normalement le passé composé :

    À l’heure de la sortie des théâtres, elle changea (a changé) d’itinéraire pour éviter les embouteillages.

    Chen posa (a posé) les mains sur la paroi et fit (a fait) signe qu’il était prêt.

    Pour tous les verbes réguliers en -er, le passé simple est formé en supprimant la terminaison (les deux dernières lettres de l’infinitif) et en les remplaçant par les terminaisons suivantes.

    parler  
    je parlai nous parlâmes
    tu parlas vous parlâtes
    il/elle/on parla ils/elles parlèrent

    Les verbes réguliers en -ir et -re ont les mêmes terminaisons :

    finir  
    je finis nous finîmes
    tu finis vous finîtes
    il/elle/on finit ils/elles finirent
    perdre  
    je perdis nous perdîmes
    tu perdis vous perdîtes
    il/elle/on perdit ils/elles perdirent

    Beaucoup d’autres verbes ont un radical dérivé du participe passé et un de deux ensembles de terminaisons :

    infinitif participe passé passé simple
    avoir eu j’eus, tu eus, il eut, nous eûmes, vous eûtes, ils eurent
    boire bu je bus, tu bus, il but, nous bûmes, vous bûtes, ils burent
    connaître connu je connus, tu connus, il connut, nous connûmes, vous connûtes, ils connurent
    croire cru je crus, tu crus, il crut, nous crûmes, vous crûtes, ils crurent
    devoir je dus, tu dus, il dut, nous dûmes, vous dûtes, ils durent
    dire dit je dis, tu dis, il dit, nous dîmes, vous dîtes, ils dirent
    écrire écrit j’écrivis, tu écrivis, il écrivit, nous écrivîmes, vous écrîvites, ils écrivirent
    falloir fallu il fallut
    lire lu je lus, tu lus, il lut, nous lûmes, vous lûtes, ils lurent
    mettre mis je mis, tu mis, il mit, nous mîmes, vous mîtes, ils mirent
    ouvrir ouvert j’ouvris, tu ouvris, il ouvrit, nous ouvrîmes, vous ouvrîtes, ils ouvrirent
    pleuvoir plu il plut
    pouvoir pu je pus, tu pus, il put, nous pûmes, vous pûtes, ils purent
    prendre pris je pris, tu pris, il prit, nous prîmes, vous prîtes, ils prirent
    recevoir reçu je reçus, tu reçus, il reçut, nous reçûmes, vous reçûtes, ils reçurent
    rire ri je ris, tu ris, il rit, nous rîmes, vous rîtes, ils rirent
    savoir su je sus, tu sus, il sut, nous sûmes, vous sûtes, ils surent
    vivre vécu je vécus, tu vécus, il vécut, nous vécûmes, vous vécûtes, ils vécurent
    vouloir voulu je voulus, tu voulus, il voulut, nous voulûmes, vous voulûtes, ils voulurent

    Quelques verbes ont un radical irrégulier (non-dérivé du participe passé), mais des terminaisons régulières :

    infinitif participe passé passé simple
    être été je fus, tu fus, il fut, nous fûmes, vous fûtes, ils furent
    faire fait je fis, tu fis, il fit, nous fîmes, vous fîtes, ils firent
    mourir mort je mourus, tu mourus, il mourut, nous mourûmes, vous mourûtes, ils moururent
    naître je naquis, tu naquis, naquit, nous naquîmes, vous naquîtes, ils naquirent
    voir vu je vis, tu vis, il vit, nous vîmes, vous vîtes, ils virent

    Les verbes tenir et venir (et leurs dérivés) ont un radical irrégulier et des terminaisons irrégulières.

    infinitif participe passé passé simple
    tenir tenu je tins, tu tins, il tint, nous tînmes, vous tîntes, ils tinrent
    venir venu je vins, tu vins, il vint, nous vînmes, vous vîntes, ils vinrent

    Le passé antérieur

    Le passé antérieur se compose du passé simple de l’auxiliaire (avoir ou être) et du participe passé du verbe. Il suit les mêmes principes pour le choix d’auxiliaire et pour l’accord du participe passé que les autres temps composés.

    Passé antérieur = auxiliaire au passé simple + participe passé du verbe principal

    parler  
    j’eus parlé nous eûmes parlé
    tu eus parlé vous eûtes parlé
    il/elle/on eut parlé ils/elles eurent parlé
    aller  
    je fus allé(e) nous fûmes allé(e)s
    tu fus allé(e) vous fûtes allé(e)(s)
    il/elle/on fut allé(e)(s) ils/elles furent allé(e)s

    Le passé antérieur occupe une place unique dans le système des temps. Comme le plus-que-parfait, il indique qu’une action est antérieure à un point de référence dans le passé (voir Plus-que-parfait). Mais généralement, l’action décrite par le passé antérieur précède immédiatement l’action qui sert comme point de référence (qui est typiquement au passé simple). Alors, dans un style littéraire, on trouve le passé antérieur pour des actions antérieures immédiates et le plus-que-parfait pour des actions qui sont antérieures de manière plus éloignée.

    Le contexte où on trouve le plus souvent le passé antérieur est dans une phrase subordonnée après une conjonction temporelle : quand, lorsque, dès que, après que, aussitôt que.

    Après qu’il lui eut transmis l’information, Charly secoua la tête.

    Quand il eut terminé, il leva la tête vers le ciel.

    Dans la phrase suivante, il y a une séquence avec une action principale et deux actions antérieures, dont une précède l’autre :

    1. Charance est coincé (plus-que-parfait dans une construction passive)
    2. Le sujet peut démêler (découvrir) la situation de Charance (passé antérieur)
    3. Le sujet fonce bride abattue (se dépêche) vers le campement (action principale au passé simple)
    Quand enfin il eut pu démêler que son fidèle Charance avait été coincé dans un piège infernal, il fonça bride abattue vers le campement dans les marécages.

    Dans un style non-littéraire, cette fonction d’antériorité immédiate est généralement remplie par le passé composé, avec la simple interprétation d’une séquence d’évènements :

    Quand elle a fini son bac, elle a décidé de travailler dans la mode.

    L’imparfait du subjonctif

    Tous les verbes, sans exception, sont réguliers à l’imparfait du subjonctif.

    Le radical de l’imparfait du subjonctif est la troisième personne du singulier du passé simple, moins le -t (s’il y a un t à la fin). À ce radical on ajoute les terminaisons -sse, -sses, -t, -ssions, -ssiez, -ssent. On ajoute un accent circonflexe à la dernière voyelle du radical pour la troisième personne du singulier, pour faire une distinction avec le passé simple. Voici quelques exemples :

    Ouvrir

    Être

    Parler

    Venir

    Dans des circonstances où on n’utilise pas les temps littéraires, il n’y a que deux temps du subjonctif : le présent (qu’il fasse) et le passé (qu’il ait fait). On utilise le présent du subjonctif quand l’action dans la phrase subordonnée est au même moment que l’action de la phrase principale, que la phrase principale soit au présent ou au passé (voir Subjonctif)

    Je suis contente que tu viennes avec moi.

    Les gens étaient contents qu’on vienne les voir. (style non-littéraire)

    Mais si on utilise les temps littéraires, le temps du subjonctif dépend du temps de la phrase principale. Si la phrase principale est au présent (et l’action de la phrase subordonnée est au même moment), on utilise le présent du subjonctif. Si la phrase principale est au passé (et l’action de la phrase subordonnée est au même moment), on utilise l’imparfait du subjonctif.

    Je suis contente que tu viennes avec moi.

    Les gens étaient contents qu’on vînt les voir. (style littéraire)

    Si la phrase principale est au présent et l’action de la phrase subordonnée est antérieure, on utilise le passé du subjonctif (dans un style littéraire ou non-littéraire). Si la phrase principale est au passé et l’action de la phrase subordonnée est antérieure, on utilise le plus-que-parfait du subjonctif (dans un style littéraire) ou le passé du subjonctif (dans un style non-littéraire).

    Le plus-que-parfait du subjonctif

    Le plus-que-parfait du subjonctif se compose de l’imparfait du subjonctif de l’auxiliaire (avoir ou être) et du participe passé du verbe. Il suit les mêmes principes pour le choix d’auxiliaire et pour l’accord du participe passé que les autres temps composés.

    plus-que-parfait du subjonctif = auxiliaire à l’imparfait du subjonctif + participe passé du verbe principal

    parler  
    j’eusse parlé nous eussions parlé
    tu eusses parlé vous eussiez parlé
    il/elle/on eût parlé ils/elles eussent parlé
    aller  
    je fusse allé(e) nous fussions allé(e)s
    tu fusses allé(e) vous fussiez allé(e)(s)
    il/elle/on fût allé(e)(s) ils/elles fussent allé(e)s

    Dans des circonstances où on n’utilise pas les temps littéraires, il n’y a que deux temps du subjonctif : le présent (qu’il fasse) et le passé (qu’il ait fait). On utilise le passé du subjonctif quand l’action dans la phrase subordonnée est antérieure à l’action de la phrase principale, que la phrase principale soit au présent ou au passé (voir Subjonctif)

    Je suis tellement contente que vous soyez venu nous voir.

    J’étais content que tout le monde soit venu. (style non-littéraire)

    Mais si on utilise les temps littéraires, le temps du subjonctif dépend du temps de la phrase principale. Si la phrase principale est au présent (et l’action de la phrase subordonnée est antérieure), on utilise le passé du subjonctif. Si la phrase principale est au passé (et l’action de la phrase subordonnée est antérieure), on utilise le plus-que-parfait du subjonctif.

    Je suis tellement contente que vous soyez venu nous voir.

    J’étais content que tout le monde fût venu. (style littéraire)

    On a donc deux systèmes du subjonctif—un système pour le style non-littéraire et un autre pour le style littéraire.

    Style non-littéraire :

    phrase principale phrase subordonnée au subjonctif
    même moment moment antérieur
    présent présent du subjonctif passé du subjonctif
    passé présent du subjonctif passé du subjonctif

    Style littéraire :

    phrase principale phrase subordonnée au subjonctif
    même moment moment antérieur
    présent présent du subjonctif passé du subjonctif
    passé imparfait du subjonctif plus-que-parfait du subjonctif

    Le plus-que-parfait du subjonctif est aussi utilisé pour remplacer le passé du conditionnel dans un style littéraire (voir Conditionnel).

    Si j’avais voté, c’eût été (aurait été) contre les amendements nos 79 et 465.

    Nous eussions préféré (aurions préféré) faire votre connaissance dans de meilleures circonstances.

    Résumé

    Voici les temps littéraires avec leur fonction et les temps qui les remplacent pour remplir cette fonction dans un style non-littéraire.

    Vérifiez votre compréhension

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